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La crise des migrants prend de l’ampleur à la frontière polono-biélorusse

La crise des migrants, dont l’épicentre se trouve à la frontière entre la Biélorussie et la Pologne, a gagné en intensité ces derniers jours. Des milliers de migrants, principalement composés de Kurdes du Moyen-orient, s’y sont amassés depuis des mois afin de tenter de passer de l’autre côté. Face à la situation, Bruxelles accuse le régime d’Alexandre Loukachenko d’avoir contribué à l’arrivée massive de ces migrants en Europe. De son côté, Varsovie déploie tous les moyens pour protéger sa frontière.

Une crise migratoire qui dure depuis des mois

Depuis plusieurs mois, des milliers de réfugiés sont entassés à la frontière polono-biélorusse sous des températures extrêmes et dans des conditions vraiment difficiles. Une situation qui soulève beaucoup d’inquiétudes au sein de l’UE qui pointe du doigt la Biélorussie d’avoir orchestré cette crise migratoire. En effet, depuis le début de l’été, le gouvernement biélorusse a favorisé la venue de plusieurs vagues de migrants en provenance du Moyen-Orient en augmentant la fréquence des vols depuis ces pays vers Minsk, en facilitant l’acheminement des réfugiés vers la frontière et en leur attribuant des visas touristiques.

Pour Bruxelles, cette crise n’est pas arrivée par hasard. Elle se manifeste à un moment où les relations entre elle et la Biélorussie se dégradent après que des sanctions économiques aient été émises à son encontre à cause de sa politique répressive contre l’opposition. L’Union Européenne qualifie ses agissements comme une riposte aux dites sanctions. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, exhorte alors les pays membres à voter de nouvelles sanctions contre Minsk, accusant ce dernier d’utiliser les migrants pour attaquer l’UE.

Une crise migratoire qui appelle une crise humaine

La crise des migrants a commencé en Lituanie en juillet 2021. Le pays a enregistré son plus haut taux de migration illégale par la frontière Lituanie-Biélorussie en quelques mois. Pas moins de 4 000 entrées illégales ont été rapportées depuis janvier alors que ce chiffre était à seulement 74 en 2020. La Lituanie a vite réagi en prenant des mesures drastiques contre la migration.

La crise s’est ensuite élargie aux frontières séparant la Lettonie de la Biélorussie, puis aujourd’hui à la frontière polono-biélorusse. En août 2021, les autorités lettonnes parlent de l’entrée illégale de 400 personnes sur son territoire, dont la moitié pour la seule journée du 10 août.

Le gouvernement polonais, pour sa part, estime qu’entre 3 000 et 4 000 réfugiés sont aujourd’hui massés près de sa frontière. D’après les gardes-frontières de Minsk, leurs conditions d’hébergement sont difficiles.

  • Ils résident dans des tentes installées dans un camp improvisé près du village de Kuznica, en Biélorussie, sous le froid glacial.
  • Ils se retrouvent face aux barbelés et à l’arsenal militaire déployé par les autorités polonaises pour empêcher leur entrée sur leur territoire.
  • Outre le manque d’eau et de nourriture, ils sont dans un état mental et physique déplorable. Depuis le début de la crise, une dizaine de personnes ont déjà péri dans cette zone.

Le gouvernement polonais a décrété l’état d’urgence dans plus de 180 localités en Pologne. Les ONG locales craignent ainsi un risque de violences et de débordements.

Les accusations se multiplient de partout

S’inquiétant de ce qui se passe aux frontières polono-biélorusses, de nombreux pays européens ont fait savoir leur inquiétude et n’ont pas manqué d’accuser la Biélorussie d’être à l’origine de cette crise. La Pologne, l’un des antagonistes de cette crise, a non seulement dénoncé le régime d’Alexandre Loukachenko d’avoir orchestré une « attaque hybride » qui menace tous les pays de l’UE à travers l’organisation de cet afflux de migrants. Elle a aussi pointé du doigt le Président russe et allié numéro un de Minsk, Vladimir Poutine, d’y avoir contribué. Bien sûr, ces accusations ont été démenties par Kremlin.

Bruxelles a annoncé mardi qu’elle est actuellement en train de surveiller 20 pays, dont la Russie, pour leur possible rôle dans l’acheminement des réfugiés vers les frontières. Parmi ces pays, on retrouve la Côte d’Ivoire, l’Azerbaïdjan, l’Afrique du Sud, l’Inde, le Nigeria, le Maroc, le Venezuela et la Syrie. De son côté, la France accuse également la Biélorussie de « destabiliser » l’Union Européenne en organisant l’arrivée massive de migrants à ses frontières. Elle a aussi fait savoir sa solidarité vis-à-vis de la Pologne dans cette situation.

Pour sa part, l’Allemagne se dit favorable aux nouvelles mesures punitives prises à l’encontre de la Biélorussie. Elle accuse son président de faire une exploitation « sans scrupules » d’humains. Par ailleurs, lors d’un entretien téléphonique, Angela Merkel a demandé au président russe de réagir face à l’instrumentalisation humaine orchestrée par Minsk et ses dirigeants.